Pour devenir humble, humble de cœur comme le veut Jésus, vous le savez, il n'y a pas de recettes, il n'y a pas de secret; il n'est pas besoin d'itinéraires ni de gradations savantes. Il ne servirait à rien de s'imaginer plus vile, plus rétive ou plus indigne que l'on n'est; et parfois un trop grand effacement peut cacher une subtile recherche de soi-même.
Au Carmel l'humilité reste simple, vivante, joyeuse, parce que c'est ainsi que Marie la concevait. L'humilité, au Carmel, c'est une sorte de transparence à Dieu et à soi-même, qui permet de redire à Dieu, sans angoisse et sans tristesse : « Oui, je suis cela, je ne suis que cela et je n'en suis que là; mais telle que je suis, je suis ton enfant, et cela suffit à mon bonheur. Ma misère ne m'empêchera pas de t'aimer aujourd'hui, de te servir "rien que pour aujourd'hui", puisque demain n'appartient qu'à Toi seul. »
Transparence aux autres, également, car, une fois vraiment engagée dans la « Montée », la fille de sainte Thérèse n'a plus de rôle à jouer, qu'il soit flatteur ou non, pas de personnage à défendre, pas de masque à garder qui protégerait l'image d'elle-même. L'humilité du Carmel, c'est la patience toute filiale de celles qui se plient au rythme de l'Esprit, qui ne s'effraient pas d'être prises sous l'ombre du Très-Haut, et qui savent attendre, comme Marie à Nazareth, l'heure où Dieu parlera.
Heureuse celle qui croit, malgré les détours imprévisibles des chemins de Dieu, qu'il y aura « un accomplissement pour tout ce qui lui a été dit de la part du Seigneur ». Le Père, qui voit dans le secret, connaît tous ses efforts; l'Esprit qui remplit l'univers perçoit toute parole, il entend tous les appels qui montent d'un cœur de pauvre; dès lors l'amour doit bannir toute crainte: la lassitude peut venir, les certitudes s'éloigner, l'espérance s'affoler aux moments de désarroi, mais Dieu jettera toujours les yeux sur l'humilité de sa servante.