Il y avait un Père missionnaire qui disait son chapelet en se promenant sur les pics derrière Dalat (Vietnam). Il le disait bien sans doute, car la Sainte Vierge écoutait bien... et voici ce qui s'ensuivit : le Père apprit le dialecte moï, rencontra et soigna un enfant blessé, le ramena à son village, noua amitié avec la tribu... Et quand le « nœud » fut jugé solide, le chef prononça cette parole mystérieuse : « Donne-nous la Dame ». Quelle Dame ? Celle que l'on voit à Dalat dans l'église... Entre midi et deux heures, à l'heure déserte, les montagnards venus pour le marché se glissaient furtivement dans la grande maison, et là, muets, admiratifs, restaient fascinés par « la Dame ». Sur ce désir tout primitif, le Père greffa ses premières instructions, ses exigences de sacrifices, et un jour il fut décidé que la Dame viendrait... Ah ! Jugez un peu du branle-bas : on nettoie le village, on construit la Case de la Dame, on coupe des palmes dans la forêt. Les musiciens, avec leurs gongs et leurs khens, descendent au-devant d'Elle. Les femmes font toilette... Et en bas, à Dalat, la colline aussi s'agite. Le couvent a préparé une grande statue, fleuri le brancard, invité toutes les autres écoles. Une longue théorie de jeune serpente dans la montagne. On récite le chapelet, on chante dans toutes les langues, en suivant une piste tracée dans l'argile rouge. Il arrive un moment où il faut traverser un torrent ! C'est alors l'épreuve du pont de lianes... Puis c'est l'accueil si émouvant de tout le « village-qui-aime-Marie », les bénédictions, les échanges de colliers et de bracelets en signe d'alliance, les offrandes, la célébration de la messe avec la récitation du Pater en latin, en français, en moï, le pique-nique de toutes les jeunesses, et les joyeux retours. « Ce n'est qu'un au revoir, mes frères. »