Thérèse de Lisieux n'avait que quatre ans et huit mois quand sa mère mourut. Dès lors, Thérèse devint timide et sensible à l'excès. Elle choisit pour seconde mère sa sœur Pauline. L'entrée de Pauline au Carmel, le 2 octobre 1882 fut une nouvelle épreuve pour l'enfant qui commença à souffrir de maux de têtes. Un soir, son oncle lui raconta des souvenirs de sa maman, et ce soir là, Thérèse fut prise d'un mal de tête extrême. La maladie empira. « Un jour, je vis Papa entrer dans la chambre de Marie où j'étais couchée ; et lui donnant plusieurs pièces d'or avec une expression de grande tristesse il lui dit d'écrire à Paris et de faire dire des messes à Notre Dame des Victoires pour qu'elle guérisse sa pauvre petite fille. Ah ! que je fus touchée en voyant la Foi et l'Amour de mon Roi chéri, j'aurais voulu pouvoir lui dire que j'étais guérie, mais je lui avais déjà fait assez de fausses joies, ce n'était pas mes désirs qui pouvaient faire un miracle, car il en fallait un pour me guérir... Il fallait un miracle et ce fut Notre Dame des Victoires qui le fit. Un Dimanche (pendant la neuvaine de messes[1]) Marie sortit dans le jardin me laissant avec Léonie qui lisait auprès de la fenêtre, au bout de quelques minutes je me mis à appeler presque tout bas : « Mama... Mama ». Léonie étant habituée à m'entendre toujours appeler ainsi, ne fit pas attention à moi. Ceci dura longtemps, alors j'appelai plus fort et enfin Marie revint, je la vis parfaitement entrer, mais je ne pouvais dire que je la reconnaissais et je continuais d'appeler toujours plus fort : « Mama... ». Je souffrais beaucoup de cette lutte forcée et inexplicable et Marie en souffrait peut-être encore plus que moi ; après de vains efforts pour me montrer qu'elle était auprès de moi, elle se mit à genoux auprès de mon lit avec Léonie et Céline puis se tournant vers la Sainte Vierge et la priant avec la ferveur d'une Mère qui demande la vie de son enfant, Marie obtint ce qu'elle désirait... Ne trouvant aucun secours sur la terre, la pauvre petite Thérèse s'était aussi tournée vers sa Mère du Ciel, elle la priait de tout son cœur d'avoir enfin pitié d'elle... Tout à coup la Sainte Vierge me parut belle, si belle que jamais je n'avais vu rien de si beau, son visage respirait une bonté et une tendresse ineffable, mais ce qui me pénétra jusqu'au fond de l'âme ce fut le « ravissant sourire de la Ste Vierge ». Alors toutes mes peines s'évanouirent, deux grosses larmes jaillirent de mes paupières et coulèrent silencieusement sur mes joues, mais c'était des larmes d'une joie sans mélange... Ah ! pensai-je, la Ste Vierge m'a souri, que je suis heureuse... oui mais jamais je ne le dirai à personne, car alors mon bonheur disparaîtrait. Sans aucun effort je baissai les yeux, et je [vis] Marie qui me regardait avec amour, elle semblait émue et paraissait se douter de la faveur que la Ste Vierge m'avait accordée... »