Il y a quelques années - en 1907 pour ceux qui aiment les dates - les paroissiens de l'Ancienne-Lorette voulant élever à Dieu un temple magnifique durent démolir leur vieille église. Il faut croire que le rosier avait accompli le nombre de ses jours, car tout se passa sans incident. Et aujourd'hui, en vertu de ce privilège qu'ont les végétaux de se survivre indéfiniment par le bouturage, le rosier de la Madone, multiplié à l'infini, embaume tous les parterres lorettains. Et j'incline à croire que, d'avoir plus d'un demi-siècle durant, vécu si près du ciel du Bon Dieu, d'avoir baigné dans la lumière du sourire de la Vierge, d'avoir écouté tant d'Angélus, ses rejetons ont gardé quelque chose de religieux et de consacré ! J'imagine qu'au fond des corolles de satin rose, les petits coeurs d'or disent encore leur prière mariale, leur mignonne et subtile prière de fleur !... Enfin, je suis certain qu'elles ne sont jamais plus heureuses, les roses du vieux rosier, que les matins où la main pieuse d'une fillette vient les cueillir pour les porter dans le coin retiré de l'église, où, dans l'ombre, la Vierge des Hurons, de ses deux doigts levés, montre toujours le ciel !...