Le soir, à 2 heures, il fut baigné dans la piscine sur une planche nue. Il pria. Dieu ne parut pas l'écouter. Et il se trouva dans le même état, à 4 heures, couché sur le passage du Saint Sacrement, plus épuisé encore par les émotions de cette journée. Soudain, il perd connaissance et devient froid. On croit qu'il va mourir, et on veut l'emporter. Mais il rouvre les yeux, croit que tout est fini ; une immense tristesse le reprend... Voici le bruit des acclamations qui accompagne la procession. Tout à coup il sent en lui comme un coup de fouet, il essaye de se soulever sur ses poignets, ce qu'il n'avait pas fait depuis vingt mois ; il retombe ; il insiste pour qu'on l'aide à descendre de sa planche, et le voilà debout, nu-pieds, en chemise, comme un cadavre sortant de son sépulcre avec son linceul. Il fait quelques pas derrière le Saint Sacrement. Toute la foule frémit, l'émotion est à son comble. Ce moribond, épuisé par vingt mois de maladie et de diète forcée, a recouvré, en une minute, la sensibilité et le mouvement. Plus de paralysie, et la faim renaît en son estomac délabré ; c'est la vie qui revient. On le conduit aussitôt au Bureau des constatations. « L'entrée de Gargam, a écrit le Dr Boissarie, forme un des épisodes les plus émouvants dont nous ayons été témoins. Soixante médecins nous entouraient... Gargam arrive sur sa planche, plié dans une longue robe de chambre... Il se dresse devant nous : c'est un spectre... » On dut, à cause de la foule, remettre au lendemain pour l'examiner plus attentivement.