Popularisé par des érudits de la Renaissance, l'histoire de la Virgo paritura (Vierge qui enfanterait un homme-Dieu) de Chartes est fréquemment regardé comme un mythe, une invention de quelque chercheur local qui, au XVI siècle, aurait voulu parer d'origines archaïques le sanctuaire, tâche facilitée par l'absence de sources écrites fiables concernant le druidisme. Une inscription latine, sur laquelle appuyer le récit, dédiée à la Vierge qui enfantera, aurait existé, puis disparu : justification commode qui évitait de plus amples recherches. Faut-il pour autant rejeter en bloc cette légende ? Pas fatalement... Outre que d'autres érudits signalèrent en leur temps, en d'autres régions, la découverte d'inscriptions analogues, qui attesteraient la réalité et la popularité de cette croyance en Gaule, la possibilité que certains druides eussent connu, par la traduction des Septante, puisqu'ils lisaient et parlaient le grec, les prophéties d'Isaïe, n'est pas invraisemblable. Pas plus qu'il est aberrant de supposer qu'ils les aient faites leurs : l'étrange aisance avec laquelle les peuples celtes se convertirent au catholicisme, comme le passage des druides irlandais du paganisme au monachisme, suffit à démontrer qu'il existait, entre la foi chrétienne et l'enseignement de la religion traditionnelle, des affinités, des passerelles, assez nombreuses, assez évidentes, pour laisser penser aux anciens prêtres que le christianisme accomplissait ce qu'ils avaient enseigné en figures.