L'Annonciation. La Vierge. Quel sujet ! Et là, devant sa toile, Angélico songeait. Tout le sujet déjà vivait là, sur sa toile, Le lis fleuri, la robe et les longs plis du voile, Près du fuseau qui dort le Saint Livre posé, L'Ange blanc qui descend du nuage rosé Et va dire l'Ave du sublime message. Il ne manquait plus rien au tableau, qu'un visage, Visage de la vierge, ineffable portrait, Et là, devant sa toile, Angélico souffrait. Ce visage il le faut souriant et sévère, Entrevoyant la crèche et rêvant au Calvaire, Reflétant à la fois la croix et le berceau, Mais j'ai beau tourmenter mon front et mon pinceau, Depuis trois jours j'attends, je commence, j'efface, Je recommence encore et rien qui satisfasse. Je promène au hasard mon crayon inquiet... Et là, devant sa toile, Angélico priait. Rien ne vient, l'idéal flotte dans son génie, Ce front où la splendeur à la grâce est unie, Il est si pur, il est si doux, il est si grand. Ma foi le voit, mon coeur le voit et le comprend, Mon âme en est ravie, elle en est possédée, Mais la main me trahit et fausse mon idée. Je ne fais rien de beau, de bien, rien de complet. Et là, devant sa toile, Angélico tremblait.