La mémoire chrétienne a fait une synthèse spontanée de Matthieu et de Luc. Les crèches réunissent les bergers et les mages, mais Matthieu ignore les bergers, comme Luc ignore les mages. Matthieu ignore la crèche, et Luc ignore les cadeaux. On méconnait à quel point Matthieu 1-2 et Luc 1-2 sont différents. Chez lui, à la différence de Luc, le héros n'est plus Marie mais Joseph, seul actif dans cet Évangile. La Vierge y apparaît comme un signe diaphane et presque énigmatique. A la différence de Luc, Matthieu ne nous offre pas une joyeuse contemplation de cet enfant, d'où rayonnent déjà l'Esprit et la grâce (Lc 2, 40, 52), la lumière et la gloire (2, 32). Matthieu l'aborde de l'extérieur comme un objet, un mystère, et même un problème : une sorte de scandale dont il scrute le sens caché. Jésus, n'ayant pas été engendré par Joseph, comment est-il le Messie ? Est-il quand même le fils de David ?