Dans son Journal, le Père Lagrange (1855-1938, fondateur de l'Ecole biblique de Jérusalem) se remémore l'événement sublime et inoubliable du premier jour où il reçut le Corps du Christ : « Je fis ma première communion le 27 mai 1866. Ma mère fut empêchée de venir à cause de son état de santé. Mon père était au chevet de son père mourant. Mon oncle et parrain Albert Falsan, voulut bien les remplacer, me montrant dès lors une affection dont il m'a donné depuis tant de preuves. Ma contrition enfantine me fit verser des torrents de larmes : mes camarades prétendirent que je m'étais confessé tout haut : ils avaient tout entendu ! Je me vois encore parmi les autres, dans cette chapelle qui a été convertie en chambrée militaire. Le soir, on allait au pied d'une statue de Marie, à l'extrémité des grandes esplanades qu'on ne peut guère appeler des cours... Comme après mon baptême, Marie me recevait sous sa garde. Elle a été la Vierge fidèle. Je suis certain d'avoir entendu ce jour-là l'appel de Dieu. J'en fis l'aveu à ma mère, venue aussitôt qu'il lui fut possible, sous un grand arbre à l'extrémité du jardin. Elle l'entendit avec bonheur. Je ne pensais pas alors qu'à être prêtre, sans penser à une vocation spéciale : elle bénit Dieu, sans paraître cependant attacher trop d'importance à l'effusion de piété d'un enfant ». Ce que le Père Lagrange a hérité de sa mère transparaît dans ce qu'il analyse du développement humain de Jésus : « On dirait qu'il y eut en lui, comme en d'autres, quelque chose de l'influence de sa mère. Sa grâce, sa finesse exquise, sa douceur indulgente n'appartiennent qu'à lui. Mais c'est bien par là que se distinguent ceux qui ont senti souvent leur coeur comme détrempé par la tendresse maternelle, leur esprit affiné par les causeries avec la femme vénérée et tendrement aimée qui se plaisait à les initier aux nuances les plus délicates de la vie. »