Personne ne m'aimait, je me sentais profondément déprimé, à tel point que je pensais que ce que j'avais de mieux à faire, c'était de supprimer mon père, et les autres personnes qui vivaient dans la maison, puis de me suicider. Pendant quinze jours, je réfléchissais au moyen de réaliser ce projet. Je voulais me venger aussi de tous ceux du quartier qui me manifestaient si peu d'amitié. Je n'avais plus d'argent pour boire ou pour acheter de la drogue. Un jour, je pris la décision de me supprimer et je sortis malheureux, découragé et sombre, pour me lancer du haut du pont Duarte . Comme je partais avec cette intention, je passai devant la maison de l'Annonciation où commençait une messe célébrée par le père Emiliano Tardif. Il y avait beaucoup de monde dans la rue, en face de la maison, car la messe se célébrait en plein air. Je vis plusieurs jeunes, garçons et filles, de mon quartier. J'entrai, non pas pour participer à la messe, mais pour embêter, caresser les filles et m'amuser. Autant passer un moment agréable, me disais-je en moi-même, avant de me suicider. Quand arriva le moment de la prière de guérison, quelques-uns furent guéris. Je n'y croyais pas. Mais je vis, sous un avocatier, un boiteux de mon quartier avec ses deux béquilles : je le connaissais depuis longtemps. A ce moment-la, le père Emiliano annonça: "Il y a un boiteux qui marche avec des béquilles et qui est en train de guérir." Le père lui demanda de se présenter. Je regardais le boiteux... Les guérisons continuèrent. Le père répéta: "Ou est le boiteux que le Seigneur a guéri ?" Je me sentais si mal a l'aise que je m'approchai du boiteux et je lui dis: "Cher ami, tu es le seul boiteux que je vois ici." II me répondit que ce n'était pas lui qui était en train de guérir. Je lui dis de nouveau: "Mon ami, si ce prêtre ne dit pas de mensonges, ce boiteux, c'est toi. Je vais t'enlever tes béquilles et si ce n'est pas toi, tu vas t'effondrer sur place." Je les lui enlevai et il resta debout. Le boiteux sortit en marchant.